05 avril 2016
Adio Lino, Adio Gian Maria
Gian Maria est parti le 30 mars 2016
Nous nous étions rencontrés en 2005 à Lyon, nous avions parlé de Cuneo, d'Erri De Luca son ami, de son épouse nommée Paola. Leur enfant n'était pas loin dans une poussette .
Quelques heures après lui est parti Lino mon père pour son dernier exil.
Una bella canzone les accompagne a dit l'amie Giovanna...
Te souvient-il de cet exil ?
De ce costume acheté à Bruxelles pour ton alliance avec Demain
Cet accordéon dans tes bagages qui s’ouvrait comme un pain
Pour que le chant des tiens bénisse le voyage
Te souvient-il de cette valise si lourde, emplie de linge
Qu’on avait écarté au vent de là-bas avant la traversée
Diras-tu la langue demeurée aux confins des fatigues
Ces rayons d’amertume pliés dans ton permis de travail :
« Arbeidvergunning »
Cette maison sans eau où la France t’attendait
La patience inventée comme une prière pour
Croire les yeux grands ouverts
Te souvient-il des premiers rires de tes enfants,
Vendangés dans la lumière de l’amour
Te souvient-il de ces heures promises au labeur
Au creux de tes mains souffrantes
Te souvient-il de ta porte ouverte au plus pauvre que toi
Ce vieux Polonais s’écroulant devant l’âtre
Epuisé de mémoire et de misère blanche
Te souvient-il de l’abîme à la banque qui s’ouvrait comme la bouche
Du nouveau –né
Ce lait de la peine que tu lui versais, confiant pour un jour repartir
Te souvient-il des saisons aux cordages serrés, de ton cœur oubliant
L’escarpement de la tâche et des forêts où tu allais couper du bois
Pour acheter nos chaussures et gagner la fierté
Ta vaillance pour qu’ici demeure une clairière où
La vie se confonde avec la bonté de la terre et des bêtes
Te souvient-il de cette tempête de 1999
Dévastant tes arbres, te dénudant aussi
Te souvient-il de ce matin de Décembre où
Tu as vus leurs racines trembler sous la pluie
Tu as pleuré ces grands gisants, ces horizons amassés
Comme autant de manteaux contre la peur
Te revois-tu planter ces arbres, penser l’aurore
A pleines mains pour ne plus voir le soleil mourant sur une ligne
De chemin de fer ni le corps de ton frère effacé
Sous le dernier train du soir
Dans ce lendemain d’épaves grotesques
Le sentiment d’exil s’est posé à nouveau sur tes épaules
Renversant ton regard bien au delà de ton bel âge
Paola Pigani
14:05 Écrit par Paola Pigani dans Musique, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gian maria testa, lino pigani
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