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25 mai 2017

A vouloir espérer

  

 

 

S’il avait pu m’advenir, au moins, un jour, de crever, de crever là, penché sur toi, sur ce lit placé contre le mur. Je t’aurais saisie dans mes bras, mince et fine, tes yeux de gosse m’auraient donné ma dernière joie d’homme et je serais mort. Et ça aurait en même temps emporté toute cette irracontable envie de bonheur fou.

Ce ne sont des choses qui se produisent. Jamais.

Libby. Dans les filaments clairs qui pénétraient lentement jusqu’à nous, dans le halo du petit jour de la chambre, j’aurais pu te dire alors le nom de ce vide que je ressentais, autrefois, sur la zone. Mélangé à la pouillerie générale, témoin constant des plaies qui s’ouvraient, comme par enchantement, dans la chair des gens de là-bas, au bout des lames. Ce vide qui m’emplissait, je sais, enfant ouvrant les yeux sur cette infernale fosse à vices et à délabrement, c’était là le vide de la tendresse. Une place sensible et jamais comblée, toute préparée, depuis toujours, sans doute, vibrante, pour recevoir cela dont nul ne se souciait dans nos cabanes regorgeantes surtout de haine froide, de bassesses entretenues et de meurtres en suspens.

Même le mot, rien que le mot, je ne l’ai pas entendu une seule fois dans la bouche de quelqu’un. Ni homme ni femme. Nous étions les seuls, peut-être, Ernst et moi, à pressentir et à vouloir espérer que la tendresse devait exister, ailleurs, quelque part, chez d’autres.

Louis Calaferte Partage des vivants Tarabuste Editeur

 

 

 

Luidgi Calaferte

17:03 Écrit par Paola Pigani dans Des livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : partage des vivants, calaferte

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