20 décembre 2023
Quitter son pays n'est pas toujours un rêve
Adolescente rêvait-elle vraiment de survoler l'Europe ?
Sa Vénétie était pauvre après guerre, peut être allait-elle travailler dans les rizières, y chanter la version originale de Bella Ciao avec des " mondine" jambes nues dans l'eau, assaillies par les zanzare ?
Elle a préféré aller faire la bonne à Milan, dans une riche famille puis en Suisse et plus tard en Belgique où elle a obtenu un premier permis de travail. Profession servante. C'est à Bruxelles qu'elle a rencontré mon père.
Ensemble, ils sont partis pour la France. Ce fut un voyage sans retour car dans ce pays d'accueil, touché déjà par l'exode rural, on appréciait que de jeunes couples viennent occuper des vieilles fermes, exploiter la terre, remplir école, église de familles nombreuses. La France n'était pourtant pas un eldorado mais mes parents se sont accrochés à ce nouveau destin, aidés par une communauté villageoise plutôt bienveillante, par leur force de travail et... les allocations familiales.
Leurs 50 ans de vie française, ils ne les ont jamais regrettés malgré les difficultés rencontrées, "porca misera" Le droit du sol a permis à toute ma fratrie de se sentir français dès l'école communale. Aujourd'hui encore , quitter son pays n'est pas toujours un rêve. On espère au moins fouler autre chose que ruines, sable, cendre ou sang.
Je regarde cette photo sépia : une jeune fille à la proue d'un aeroplane factice qui ne sait pas encore où atterrir. Elle s'appelait Inès Roman, c'était ma très chère mère. La devise de notre pays est-t-elle désormais factice comme cet avion de papier ?
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10:57 Écrit par Paola Pigani dans Des orties et des hommes, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : travailleurs immigres, rital, hospitalite, porcamiseria, des orties et des hommes, republique française, loi immigration, préférence nationale