08 janvier 2013
La fontaine aux cieux
La fontaine aux cieux
Nos voix quittaient nos bouches pour mourir à la source
L’écho d’alors nous venait de la fontaine des cieux
Un escalier de pierre pour y descendre à pas d’indiens
Une rampe rouillée pour y glisser à califourchon
Jusqu’au bord du vide
Dans ce trou d’ombre
Cerné de lichen et de salpêtre
Palpitait notre monstre
L’eau boueuse en hiver
Nous appelait vers le jeu
Plus vivement encore
La pointe des pieds touchant le péril d’eau
On regardait bouche bée
Naître un autre monde
Le nœud des eaux nous gagnait le ventre
La caresse froide de la vase léchait nos orteils
Une main agrippait nos robes
Quand le garçon se décidait à pisser dans l’eau
La peur retombait
Les autres pouvaient lâcher leur cri
Courir rattraper un papier de carambar
De l’autre côté du pont
L’écho d’alors s’imposait comme la preuve d’un enfer vaincu
On pouvait donc aller plus loin
Rire à la gorge des rivières
Toujours plus loin
Le Son indolent, la Bonnieure
Attacher l’eau à nos chevilles
Marcher dans l’onde
Disparaître
Apparaître
La peur de l’eau nous couvrait de soleil
Sur les rives d’hier
Notre enfance en joncs et en prières
Pour ce qui est
Ce qui n’est plus
Ce qui sera
Les cailloux jetés comme des obus
Le regard qui saute
Sur ce qui est ce qui n’est plus
Sous les arbres
Serrés comme des cordes
La lumière peine
Mais donne ses fruits
À qui veut bien les rendre
Eaux sourdes où vacillent les arbres témoins
Les jambes des petites filles
Leur corps en pilotis
L’eau qui bat leurs chevilles
Remonte au coton pauvre sur leur ventre
Elles avancent pourtant bravent l’au de là de l’eau
Qui détient la moitié de leur corps englouti
Les robes flottent à la surface
Comme des bannières d'Adieux
Le monde jette un froid entre la peau et le cœur.
Paola Pigani
11:40 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cellefrouin, le son, la bonnieure
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