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12 janvier 2013

Le vin

 

 

 

D’un regard il me fit plus belle
et je pris cette beauté pour moi.
Heureuse, j’avalai une étoile.

Il m’invente
telle mon reflet dans ses yeux.
Et je danse, danse
ailes déployées

La table est table, le vin est vin
dans un verre qui est verre
solidement posé sur la table.
Mais moi dans tout cela
je ne suis qu’une illusion
illusion sans limites
illusion jusqu’au sang.

Je lui parle de ce qu’il veut entendre:
des fourmis mourant d’amour
sous l’étoile du pissenlit.
Je lui jure que les roses
chantent quand elles ont bu du vin.

Je ris, je penche la tête
prudente comme si je faisais une expérimentation
et je danse, et danse
dans une peau étonnée d’être à moi
dans des bras qui me donnent forme.

Eve de la côte, Vénus de l’écume
Minerve du front de Jupiter
furent plus réelles que moi.

Quand il ne me regarde plus
je cherche mon reflet sur le mur
et ne voit qu’un clou
sans tableau.

Wislawa Szymborska

 

17:33 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : wislawa szymborska

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