10 mars 2013
Chronique d'une journée moyenne
Doucement tu laisses ruiner les vergers d’octobre, l’ocre verdit des pruniers et des trembles, les rives argentines de la rivière sous les pluies pleines de silence. On partira pour Lisbonne ou Turin. On verra le jet d’eau des marbres et des églises, de beaux ciels en abîmes. Autour de nous, pas pressés, tout serré, petit vrai grand rêve d’après-midi d’instants d’automne qui étonnent. Le vent coule croisé sur la route et le rose carmin d’un charme bleuit la treille. On traversera le pays où quand quelqu’un meurt on enterre son nom dans un grand pré dormi par les fleurs. On versera le vin et les frêles notes d’un piano feront trembler l’ivoire odalisque des salles. Au creux du ciel ocre doux bruiné on verra le Livre. Les sons vifs et contristés qui prédisent les magies du lendemain. Sur une route brève, dévorée de bruyères et d’édifices dans l’air, on verra Rappalo et les Cinque Terre, la Tentation de Saint Antoine peinte par Brueghel dans la petite église de Gênes. La mer et les terrasses laisseront passer dans le soupir du vent, le prodigieux musicien, le savant au fauteuil sombre, le promeneur sur la jetée qui sent le clair déluge sourdre des prés, stylistes incomparables parcourus par les doigts électriques et bleus du silence.
Patrick Laupin. Chronique d’une journée moyenne. Editions La rumeur libre.2012
Patrick Laupin sera aujourd'hui au
Périscope 13 rue Delandine Lyon 2
de 17h à 19h30
« De vieilles ombres sont de retour et nous fixent sans trembler. »
Patrick Chamoiseau
Ouvrir et lire un nouveau livre de Patrick Laupin, c’est comme ouvrir une nouvelle fois les yeux, et c’est surtout naître puis grandir à la vie. Patrick, une fois de plus, avec Chronique d’une journée moyenne, nous renvoie sans ménagement à notre propre réalité. Ses mots, murmures ou cris, poèmes ou chants, mettent en lumière une vérité fragile ou perdue, mais une vérité blessée et crue. Patrick Laupin est sûrement l’une des voix les plus singulières, et donc l’une des voix les plus précieuses, de ces temps de confusion extrême et de libéralisme sauvage. Sa Chronique répond à la tourmente avec authenticité et profondeur. Patrick est totalement libre de sa parole et du choix de ses actes. Ses fragments se situent au bord de l’abîme, à mi-distance de la prose éclairée, inspirée et légère d’un Christian Bobin, et de l’écriture devenue presque silencieuse mais tellement vitale d’un Bernard Noël. Entre les deux, et à mi-voix, son cœur balance. Entre mystique à l’état brut et révolte ordinaire. Entre tendresse infinie et complète désobéissance. Les livres de Patrick Laupin sont nécessaires comme le bon pain et le vin couleur sang. Son œuvre, tellement essentielle à mes yeux et fatalement à mon goût, résiste à l’usure environnante et témoigne de ce que nous sommes, hommes du désir, à la fois énergiques et impuissants… Oui, oui, j’ai dit : énergiques et impuissants ! En témoignent, simplement, ces deux courtes phrases tirées de son Petit Traité des barbaries banales : « Dans le songe creux hésitant on parle tout seul dans le vent. Le début et la fin semblent tenir en un seul mot. »
Thierry Renard
07:11 Écrit par Paola Pigani dans Des livres, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : patrick laupin, la rumeur libre, thierry renard
02 mars 2013
De l'autre côté du pont
C'est ce soir, à 2 pas de la Guill'.
Nous serons plusieurs voix du côté de la poésie, de l'autre côté du Pont...
11:10 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : syndicat des poètes, lyon, de l'autre côté du pont
20 février 2013
Le livre pour sortir au jour
C’est comme un périple dans notre propre pesanteur que nous donnent à lire et à voir Jean-Baptiste Cabaud et Magali Mélin. On avance dans le noir mais c’est un livre pour sortir au jour après avoir dévidé l’écheveau des nerfs, après avoir été tenté par la disparition ; c’est long désapprendre à mourir.
Les mots ne sont jamais innocents. Lequel choisir pour reprendre son souffle ? Les mots nous suivent, ils ne nous précèdent pas. C’est la vie qui avance en premier. C’est la vie qui franchit le pierrier. Les mots nous suivent encore, fragments de nous mêmes avec la densité d’une marche aveugle. J’aurais aimé avoir choisi de vivre le destin des avions sur la mer. On avance vaille que vaille car il faut traverser, l’obscur, l’amer... On descend les paliers de l’air avec ces trois verbes : aimer, choisir, vivre. C’est un étrange débarquement au beau milieu de nulle part dans une phrase immense sans ponctuation, un magma de mots, une marée intérieure. On suit Jean-Baptiste Cabaud, on tente de s’accrocher aux récifs, musique, ville, ordinateur, souvenirs d’amour, ce soi qu’on n’arrive pas à saisir, se tenir loin de tout littoral, aller vers le risque de la vie, vers le risque de la poésie jusqu’à entrer dans le monde par le corps.
Il y a entre les pages écrites, les chevelures d’orage de Magali Mélin. Des lignes d’horizon captivantes où tout se dédouble. Puis une plage apparait, des taches deviennent presque humaines, comme des humeurs qui suintent d’un grand corps absent. L’espace devient écriture à son tour avec ses parallèles complices, ces chemins gras, des traces de croisement, d’effusions. Le noir revient ondoyer, tournoyer pour s’assagir. Qu’est-ce que l’artiste laisse vivre avant de rendre grâce au papier et au silence ? Le mystère reste latent.
Paola Pigani
Le livre pour sortir au jour. Jean-Baptiste Cabaud .Magali Mélin. Editions Le pédalo ivre. 2013.
Exposition à la Galerie l'Oujopo
Du 14 février au 11 mars 2013
40, rue de la Viabert
69006 Lyon
Soirée lecture
Lundi 11 mars à 20h
en présence des artistes
et de Frédérick Houdaer
22:00 Écrit par Paola Pigani dans Des livres, Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : j-b cabaud, magali mélin, houdaer frédérick
18 février 2013
Saone
Les clapotis contre les berges
Ta bouche tes baisers sur ma nuque
Quand tu m’as dit
N’avoir jamais vu Venise
La Saône lascive
Est tendre à nos yeux
Loin des sortilèges de la Sérénissime
L’été monté trop tôt
Sur les épaules des femmes
Un ciel sans nuage
Sur les places
Sable et poussière
Tes yeux secs
Quand tu m’as dit
N’avoir jamais su souffrir
La Saône à nos pieds
Donne sa leçon d’eau et d’oubli
Paola Pigani
Extrait du receuil Indovina
11:00 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : saone
17 février 2013
La dernière page
Commencer par la dernière page
Pour les journeaux, les livres de poésie
Choisir de m'asseoir dans un train
dans le sens inverse de la marche
Caresser tes pieds avant tes lèvres
Compter ce qui n'a plus de valeur
Aux yeux des autres
Paola Pigani
16:48 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
10 février 2013
Les chaussures de Pavese
Il porte des chaussures anglaises
Intemporelles
Qui lui font des pieds de poète
J’imagine qu’elles devancent ses pas
Ce pourrait être les chaussures
de Pessoa ou de Pavese
Ou les chaussures d’un homme
Qui aime se perdre et penser
Que les femmes mentent.
Paola Pigani
16:41 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
08 février 2013
C'est un jour indicible
C’est un jour indicible
On ne sait pas
Ce qui se lève
Avec tout notre sang
Qui ne dort jamais
Ce qui se lève
Entre nos jambes
Entre nos bras
Aux quatre points cardinaux
De notre dernier sommeil
Un vol d’étourneaux
Le ciel serré
Contre les arbres
Les mots qu’on n’a pas dits
Le gant perdu hier
La main qui manquera désormais
Pour dire Adieu
Paola Pigani
20:56 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
01 février 2013
Considero valore
12:11 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
31 janvier 2013
i giorni e le notti
I giorni e le notti
Suonano
In questi miei nerii nervi
Di arpa
Vivo di questa gioia
Malata di universo
E soffro
Di non saprela
Accendere
Nelle mie
Parole.
Giuseppe Ungaretti
11:21 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ungaretti
30 janvier 2013
Il n'y a pas de voix perdue
Une ombre peut-être, rien qu’une nommée pour les besoins de la cause
Tout lien rompu avec sa propre figure.
Si faire entendre une voix venue d’ailleurs
Inaccessible au temps et à l’usure
Se révèle non moins illusoire qu’un rêve
Il y a pourtant en elle quelque chose qui dure
Même après que s’en est perdu le sens
Son timbre vibre encore au loin comme un orage
Dont on ne sait s’il se rapproche ou s’en va.
Louis- René Des Forêts
11:17 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)