04 septembre 2013
Béton armé Shanghai au corps à corps

« Veiller au poids bagage et ce qu’on emmène pour lecture. » Je pars pour la Chine. Mes bagages ne pèsent pas lourd. Ils font le poids de mon squelette, un dixième du poids de mon corps, cinq à six kilos d’os, le poids de la Bible de Gutemberg déposée à la bibliothèque Mazarine, le poids de La Divine Comédie dans son édition imprimée de 1555, le poids d’un enfant de six mois, le poids de ma vie d’adulte.
J’ai rencontré Philippe Rahmy le 28 juin 2013 à Paris où nous présentions chacun un livre à paraître pour cette rentrée. Mais nous nous étions croisés sans nous voir en 2009 entre les pages de l’album Des stèles aux étoiles autour de l’œuvre de Winfried Veit.
Philippe Rahmy, un corps, un visage sans âge mais quelque chose de l’enfance trépigne dans se jambes, dans ses yeux. Homme advenu par la grâce de l’écriture. Une charpente osseuse fragile mais la charpente mentale d’une cathédrale. Des trouées de lumière à travers des vitraux, une poésie qui scinde sa vision du monde et des hommes, l’énigme d’être, d’une part, l’enveloppe, la peau, la parure, d’autre-part.
Ainsi dans Béton armé, cet événement dans sa vie d’enfant, une scène qu’on pourrait croire sacrificielle:le petit garçon assiste et participe (étrange injonction paternelle) à la tuerie d’un lapin où le geste de tuer lui apprend qu’il peut être puissant. Le plus fascinant dans l’évocation de ce souvenir, c’est le dépouillement de l’animal. Son regard de poète lui serait-il venu à cet instant ? La peau qui se détache de la chair. Il semble que Philippe Rahmy ait toujours eu le corps à vif. Qu’a-t-il fait de sa douleur sinon la hisser à hauteur de ses yeux ?
A travers lui, je vois la foule, les buildings, les lueurs de Shangaï, une ville traversée par remous sensuel et magnétique, des ilots humains au beau milieu d’une folie verticale.
Shanghai et moi avons le même goût pour la violence. Nous nous sommes construits et nous continuons de grandir par accidents successifs. Jamais je n’ai vu autant de corps meurtris qu’à Shanghai. Il n’y a ni guerre ni famine. Les gens semblent heureux. Mais chaque rue résonne de chocs et de cris. Désormais sur le point de partir, je perçois un rapport entre cette ville et mes souvenirs. Je pleure. Tous les murmures de la cité passent dans mes sanglots.
L’homme n’y est pas moindre. Corps cloués dans le désir ou en perte de vitesse. Solitudes palpables ...Voir, sentir avec Philippe Rahmy les femmes furtives, les artifices, les immondices d’une incroyable mégapole, être cinglée de ces images successives avant d’être gagné par la même torpeur qui l’assaille dans une chambre d’hôtel où lui parviennent des cartes aux filles nues glissées chaque soir sous ma porte, lien charnel entre le vide en soi et le monde (…)
La littérature est possible parce qu’elle est périssable. Son agonie, plus lente que la nôtre, nous donne le sentiment de l’éternité. La littérature nous accorde un sursis. Ce qu’on écrit dépasse ce qu’on est.
Paola Pigani
Béton armé. Philippe Rahmy. Édition La table ronde. 2013
A paraitre le 5 septembre 2013
07:17 Écrit par Paola Pigani dans Des livres, Poésie, Voyage | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philippe rahmy, la table ronde, veit
02 septembre 2013
Allegretto de Bâle
Sur les pins qui dansent
L'allegretto des aiguilles
Que le vent balance
Ma bouche comme une blessure
La saveur des privations est fade
Il faut brûler mon âme
C'est un paysage léché par les flammes
Ces arbres vaudraient-ils mieux que nous?
Il faut que meure cette pensée
Acier inoxydable froid en main
Aveuglement des doigts crispés sur le manche
À éclairer les fleurs de ma face
Comme on laboure les champs d'en face
Floraison sombre et farouche
Qu'il faut toujours rabattre
On vise encore à l'harmonie
S'il ne s'agissait au final que de vide
On dit que c'est de la mauvaise graine
Mais où va donc pouvoir se loger la vie
L'amant a-t-il vidé les lieux?
Cet inconnu qui me lâche et qui
Descend la solitude des marches
Le silence violent du soir
La meute a-t-elle couru au loin?
L'horloge qui avance encore et lâche
D'un coup la mesure du temps
Eva Buffoni
16:20 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : buffoni
01 septembre 2013
Une poèsie qui vole dans les plumes
JE SUIS MIGRANT
TU ES MIGRANT
IL EST MIGRANT
NOUS SOMMES PRESSES
Nous avons un cœur
nous avons une âme
nous avons été belges à la fin du XIX ème
polonais dans les années 30 puis
italiens puis
maghrébins
actuellement
comoriens ou africains
migrants nous avons été
mais maintenant il est six heures
les balais sont rangés
et la journée commence
et elle est peuplée
d'hommes
avec des visages
des noms
des numéros de série
des tenants et des aboutissants bien connus des services
et tout est propre
et le fait que quelqu
'un ait du être là pour nettoyer
un souffle
à peine
une pensée
mais maintenant il est six heures
maintenant
nous sommes pressés
Grégoire Damon
Mon vrai boulot .
Édition Le Pédalo Ivre 2013
©paolapigani
18:05 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gregoire damon, le pédalo ivre
14 août 2013
Auguri
Il faudrait pouvoir aimer des autres tout ce qu'on ne voit pas d'eux.
Thierry Renard. Canicule et vendetta.Le bruit des autres.2013
06:28 Écrit par Paola Pigani dans Des livres, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : thierry renard
09 août 2013
Estate
17:55 Écrit par Paola Pigani dans Musique, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nougaro, capossela
06 août 2013
Michelangelo
Aime, et brûle, car qui meurt
n'a pour voler au ciel en ce mondes autres ailes
Michelangelo

07:12 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michelangelo
01 août 2013
Exode
Elle, sauvage comme l'ombre aux draps de soie du crépuscule d'été
Lèche les larmes du soleil.
Semant à travers les broussailles les instants chimère de sa vie en espalier
Elle s'élance dans la clameur des ailes
Épouse la marche antique des fleuves.
Les herbes chiffons charment ses pieds nus.
Où va-t-elle ?
Sinon fuir tout ce qui s'est fait pierre brûlée
Dont la bêtise noue le ventre jusqu'à mourir.
Son secret est enclos dans une noix.
Colette Lafont
07:28 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : colette lafont
31 juillet 2013
Leonardo
19:03 Écrit par Paola Pigani dans Des films, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : di caprio
29 juillet 2013
Les mots de la terre
Il faut que tu saches
Pour les champs en jachère,
Pour l’andaineuse, la botteleuse
Il faut que tu saches
Les mots de la terre
Ceux du plein et du rien
Ceux de l’envol et de la putréfaction
Il faut que tu saches
Pour ne pas dire
A quoi peut ressembler l’amour
Paola Pigani

18:54 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
28 juillet 2013
La nuit, je nais
©paolapigani
Quand sait-on que c'est la nuit?
Quand on ne sait plus s'il faut
sauver sa peau
ou
s'apprêter à en changer?
quand on plie notre ancienne
peau
qu'on la laisse reposer sur un valet
et que l'on ferme la porte de la chambre
pour empêcher le chat de venir griffer
ce qui pend?
Fredérick Houdaer extrait du spectacle Jeunet, la nuit.La nuit, je nais. Compagnie Chiloé
13:05 Écrit par Paola Pigani dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : compagnie chiloé, houdaer frédérick
















